C’est l’été…. On vide le grenier, on vire…, on désencombre et les vieux papiers prennent le chemin des poubelles.
Parfois, le vieux livre qu’on n’a pas ouvert n’entre pas dans le container à papier parce qu’il est trop large. Alors, on le laisse là, car il faut qu’il parte. C’est tellement encombrant !
Et puis, un quidam vient là lui aussi et se débarrasse de ses vieux papiers.
— Tiens ! Un grand livre avec des coins en métal ? Ça ne doit pas dater d’hier !
Le quidam, curieux, ouvre cet étrange bouquin. Une date le frappe : 1835.
Et des comptes, et des comptes encore dans une merveilleuse écriture à l’encre de Chine.
Ce quidam qui n’est autre que Philippe Marguet a la bonne idée de récupérer ce livre et de le confier à l’Association du Patrimoine « La Costelle » de Fraize. Excellente initiative ! Philippe vient tout simplement de sauver le premier Grand Livre comptable de Nicolas Géliot tout juste installé à Habeaurupt, point de départ d’une aventure textile qui va durer près de 140 ans.
D’où venait ce livre ? Qui l’a déposé là ? On ne le saura sûrement jamais. Probablement qu’il faisait partie d’un ensemble de registres moins larges qui glissèrent à jamais dans le container de l’oubli. Peu importe ! Il faudra, bien sûr, décrypter ce livre comptable. Il est en tout cas beau à lire avec ses deux cents feuillets. On y fait même le voyage du coton en laine qui, venant de Louisiane en bateau à voiles jusqu’au Havre, arrive jusqu’à chez nous en cahotant sur les chemins de terre… et cela en 1835. En combien de mois ? Le livre ne nous le dit pas…
Alors, avant de glisser le vieux livre du grenier dans la fente irrémédiable du container à papier, pensez au patrimoine, à nos aïeux et leur histoire en sueur. C’est tout simplement ce qu’a fait Philippe Marguet… Merci à lui !
François Maubré, « La Costelle », 2006.
